Les moyens d'expression avant l'écriture

L'homme primitif recourait aux moyens d'expression les plus divers. Même si nous ne retenons que ceux qui étaient momentanés et qui ne convenaient qu'à la communication immédiate avec le prochain, ils nous apparaissent fort nombreux, beaucoup plus que ceux dont l'homme civilisé a conservé l'usage.

Ce dernier en est réduit pratiquement au langage articulé ; encore celui-ci a-t-il perdu les "clics" et la plupart des bruits ou sono résultant de mouvements inspiratoires et non expiratoires ; si la mimique accompagne encore la parole, elle ne peut se substituer à elle que rarement et dans des cas limités. Chez les primitifs, au contraire, il existe souvent un langage gestuel, indépendant du langage articulés, possédant un vocabulaire étendu et même sa syntaxe propre. Deux Indiens nord-américains, dont les tribus parlaient des dialectes différents, étaient souvent capables de converser pendant de longues heures sur des sujets variés, avec le seul secours a leurs doigts. Dans certaines tribus australiennes un tabou rigoureux impose le silence aux veuves pendant plusieurs mois ; elles n'en souffrent guère, accoutumées qu' elles sont à poursuivre avec leurs mains d'interminables commérages. Il est à peine besoin de rappeler le large emploi qui a toujours été fait, et un peu partout, des fumées et des feux, soit simplement pour donner l'alarme, soit pour fournir des indications plus précises.

En Afrique occidentale l'usage des tambours pour transmettre rapidement les nouvelles d'un village à l'autre est bien connu. Selon le son produit on peut annoncer ainsi : la convocation faite par un chef, l'approche d'un ennemi ou d'un sinistre (le feu, par exemple), la mort d'un notable, la venue d'un Européen, l'appel aux armes, l'invitation à une fête, etc. Des usages analogues existent dans la Mélanésie.

Il n'est pas jusqu'au sens du toucher auquel on n'ait eu recours, sans parler de l'alphabet Braille, à l'usage des aveugles, qui est de création récente, ainsi que le Langage des Signes à destination des sourds et mal-entendant. Il est d'usage dans certaines sociétés secrètes de communiquer certains renseignements au moyen de la disposition des doigts, quand on donne une poignée de main.

James G. Février "L'histoire de l'écriture"